Ce petit site est consacré au long-métrage inédit en France de Richard J.Thomson, BLOODY FLOWERS, tourné en 2008 et qui n’a connu qu’une distribution dvd aux USA et au Canada. Vous avez dit film culte ?

"On sent la patte d'un vrai cinéaste qui, de manière inexplicable, semble boudé par les producteurs français". Horreur.com

 

Culte, BLOODY FLOWERS ? Richard J.Thomson est déjà un cinéaste culte, pour plus d’un cinéphile. Ce pionnier du DTV (Direct To Video) français, plus ou moins lié à la joyeuse bande de la revue MAD MOVIES , s’est fait connaître tout jeune dans les années 90 en tournant des films parodiques de série Z totalement fauchés comme Time Demon ou Jurassic Trash. Depuis le cinéaste a produit des clips de rap et quelques longs-métrages décalés (dont l’épouvantable EJECT de Jean-Marc Vincent), réalisé des documentaires, il est même devenu un temps journaliste et photographe. Sans jamais connaître le succès… Son ami Jean-Pierre Putters, le fondateur de MAD MOVIES, le présente d’ailleurs comme le réalisateur le plus malchanceux de tous les temps. En effet, la carrière de Thomson semble pavée de rendez-vous manqués et si on lit ses interviews sur son blog ou dans la presse, on se rend compte que Thomson tente depuis vingt ans de réunir assez d’argent pour tourner un « vrai » film pour le cinéma, en vain jusqu’à présent. Il faut dire que Thomson s’obstine (ce qui, à mes yeux, me paraît profondément respectable) à œuvrer dans le genre qu’il affectionne, le cinéma fantastique, mais qui n’est absolument pas la tasse de thé des producteurs et financiers du cinéma français !

 

Le film commence par un strip-tease en cabaret, puis la danseuse est suivie par un inquiétant personnage.
Le film commence par un strip-tease en cabaret, puis la danseuse est suivie par un inquiétant personnage.
Doria Tillier (miss météo de Canal Plus) dans le rôle du médecin légiste...
Doria Tillier (miss météo de Canal Plus) dans le rôle du médecin légiste...

La « malédiction

BLOODY FLOWERS »

 

Son thriller BLOODY FLOWERS a ainsi été tourné avec les propres deniers du réalisateur, environ 30 000 euros selon ses dires, lors d’un tournage présenté comme « très bref mais intense » par le réalisateur dans les bonus du dvd américain. Comble de malchance , le tournage a semble-t-il été un enfer pour Thomson, avec notamment l’accident d’un acteur incarnant le méchant du film, personnage qui a donc dû être supprimé, entrainant une réécriture du scénario sur le tournage. La malédiction semble poursuivre le film car la sortie française, chez l’éditeur Emylia, a également été annulée au dernier moment pour cause d’un procès avec l’actrice tenant le rôle principal, qui tentait de faire interdire le film. Seul un dvd en langue anglaise a donc été distribué par le petit éditeur By Jove ! en zone 1. Un dvd rare qui fait de ce métrage le plus mystérieux de la filmo de son réalisateur. Mais revenons au film lui-même. 

On suit ensuite le parcours de jeunes modèles débarquées des pays de l'Est.
On suit ensuite le parcours de jeunes modèles débarquées des pays de l'Est.

Pour qui connaît les précédents films de Thomson, cette œuvre est assez surprenante, car il ne s’agit pas d’ une comédie. Le scénario narre l’arrivée à Paris de trois jeunes filles des pays de l’Est, venues faire carrière dans le mannequinat. Elles sont drivées par un agent véreux, qui les présente à une célèbre styliste (jouée par Amanda Lear, excellente). Mais cette dernière et l’agent se font assassiner sous les yeux des trois demoiselles et les voilà elles-mêmes poursuivies par de mystérieux tueurs cagoulés. Puis elles font la connaissance d’un jeune homme qui les présente à un producteur de film d’horreur, qui finit par les séquestrer sur les décors de sa production… Elles découvrent qu’il s’agit de snuff movie. Une intrigue plutôt tirée par les cheveux, d’autant qu’en parallèle, on suit les crimes d’un serial-killer surnommé « le tueur à l’ours en peluche » qui égorge des strip-teaseuses après leur avoir offert des bonbons !

Disons le tout net, le scénario est l’un des points faibles du film, cela s’expliquant peut-être par la réécriture en cours de tournage imposée par divers incidents. En effet, il semble parfois qu’il manque des séquences entières notamment pour expliquer le lien entre les déboires des jeunes filles aux mains d’un producteur sadique et les crimes du tueur en série qui sévit dans les bas quartiers parisiens.

Par certains côtés le film évoque le giallo et on se demande si Thomson n’a pas quelques origines italiennes ! 

Amanda Lear interprète le rôle de Charlotte de Saint-Martin, une styliste démoniaque...
Amanda Lear interprète le rôle de Charlotte de Saint-Martin, une styliste démoniaque...
Après la mort de leur manager, les filles se retrouvent hébergées chez un jeune homme.
Après la mort de leur manager, les filles se retrouvent hébergées chez un jeune homme.

Un film aux diverses influences

 

Dans l’interview du bonus, Thomson déclare avoir voulu rendre hommage aux « thrillers surnaturels des années 80 » et notamment à Brian de Palma. En effet, certaines séquences sont imprégnées d’une atmosphère évoquant un peu les BODY DOUBLE , PULSIONS ou L’ESPRIT DE CAIN, ce qui donne incontestablement un style rétro au film de Thomson. Le thème du voyeurisme, présent dans BLOODY FLOWERS, fait penser à l’univers de De Palma. Ce qui ajoute encore à la ressemblance, c‘est la musique (composée par Thomson lui-même) avec ses violons sirupeux ou au contraire angoissants, qui apparaît comme un hommage à Pino Donaggio, le compositeur de De Palma.

 

Mais BLOODY FLOWERS fait aussi penser à l’œuvre d’un autre cinéaste, Dario Argento. Les défauts du film de Thomson rappellent justement l’imperfection narrative (parfois l’incohérence) des œuvres du maître de l’horreur transalpin.

Bien sur, nous sommes plus près des œuvres mineures d’Argento (telles TRAUMA ou LE SANG DES INNOCENTS) que de ses chefs d’œuvre.

Pour autant, il est surprenant de ressentir un tel parfum rétro et nostalgique dans un film des années 2000 tourné par un Thomson plutôt jeune (il n’a pas quarante ans). Un côté vintage (renforcé par les décors du film qui se situe dans le vieux quartier de Montmartre) qui ajoute à la sympathie qu‘on peut ressentir pour ce film inégal mais plutôt réussi esthétiquement.

En parallèle, on assite aux meurtres d'un serial-killer...
En parallèle, on assite aux meurtres d'un serial-killer...
Les filles sont engagées par un étrange producteur de films d'horreur.
Les filles sont engagées par un étrange producteur de films d'horreur.
Il se passe des choses étranges sur les lieux de tournage du film...
Il se passe des choses étranges sur les lieux de tournage du film...

Un film anachronique

 

Au final, que penser de BLOODY FLOWERS ? Certes le film a des défauts : outre le scénario, on peut noter un jeu approximatif de certains comédiens (globalement, les seconds rôles sont meilleurs que les « vedettes »). Amanda Lear compose une styliste délicieusement désagréable et on aperçoit pour la première fois à l’écran la miss Météo de Canal Plus Doria Tillier. Au rayon des qualités du film, plaçons la réalisation de Thomson qui parvient, avec peu de moyens, à créer une ambiance mystérieuse et onirique, même si le rythme du film est un peu lent. Quant aux rares séquences gore, elles sont réussies mais pas vraiment effrayantes car désamorcées par un certain humour noir qui leur confère un aspect quasi surréaliste (la scène de torture sur fond sonore de vieilles chansons françaises…). Un film ovni et assez anachronique, presque « à l’ancienne », inabouti certes mais qui démontre néanmoins le talent de Richard J.Thomson hors de la comédie et qui fait regretter que ce cinéaste ne dispose pas de davantage de moyens financiers pour mener à bien ses projets.

Verrons nous un jour BLOODY FLOWERS en France ? Il faut l’espérer en raison de ses qualités et de son originalité mais rien n’est annoncé. Sinon il reste le dvd américain, qu’on peut se procurer sur internet…

Le gore se concentre surtout dans la dernière partie du film.
Le gore se concentre surtout dans la dernière partie du film.
La police mettra 1h20 à dénouer les fils du mystère.
La police mettra 1h20 à dénouer les fils du mystère.